Moi c’est Alice, styliste enfant et aujourd’hui je m’incruste sur le blog de Wendy pour vous parler de ma spécialité : le vêtement enfant ! En tant que styliste spécialisée dans l’enfant et le bébé, les contraintes que je rencontre au quotidien dans mon travail sont complètement différentes des stylistes qui travaillent sur le prêt-à-porter adulte. Ma mission : répondre à des besoins esthétiques tout en garantissant la sécurité et le confort.
Dans cet article, je vous explique les spécificités de ce secteur et l’importance de la collaboration entre styliste et modéliste enfant.

Les spécificités du modélisme enfant
Adapter les vêtements à la morphologie enfantine
Comme pour l’adulte, le secteur textile enfant propose différentes tailles de produits. Seulement, au lieu d’évoluer de taille en taille (34, 36, 38) ou évolue d’âge en âge (6 mois, 9 mois, 12 mois). Pour le bébé, en général, on trouve des tailles de 3 mois en 3 mois avec des indications en centimètre. Pour l’enfant, à partir de 2 ans, on avance d’âge en âge jusqu’à 6 ans, ou on avance par 2 ans jusqu’au 16 ans. Ce qui donne :
- Tailles bébé : 1 mois – 3 mois – 6 mois – 9 mois – 12 mois – 18 mois – 24 mois
- Tailles enfant : 2 ans – 3 ans – 4 ans – 5 ans – 6 ans – 8 ans – 10 ans – 12 ans – 14 ans – 16 ans
Le challenge : proposer des vêtements adaptés aux mesures moyennes actuelles des enfants.
Les proportions des produits sont également différentes chez l’enfant, car les contraintes corporelles varient de l’adulte : on retrouve peu de musculatures ou de poitrine avant 10 ans.

L’évolution des morphologies chez l’enfant
Les tailles garçons et filles commencent à différer autour de 10-12 ans, en raison des changements corporels liés à la puberté.
- Avant 10 ans : les tailles sont généralement unisexes, avec peu de différences morphologiques entre garçons et filles.
- À partir de 10-12 ans : les filles commencent à avoir des hanches plus marquées et une poitrine qui se développe, tandis que les garçons conservent une silhouette plus droite.
- À partir de 14 ans : les différences deviennent plus prononcées, notamment avec l’élargissement des épaules et la croissance plus tardive, mais plus marquée des garçons.
Les marques adaptent donc leurs coupes et leurs gradations à partir de la préadolescence pour mieux correspondre à ces évolutions morphologiques.
Petit conseil si vous créez votre marque de vêtements enfant : plus on propose de tailles différentes, plus on investit d’argent. C’est pourquoi je vous conseille d’éviter de multiplier trop les tailles dans un premier temps. Rien ne vous empêche par la suite d’élargir votre gamme.
Finalement, pour le modélisme enfant, il est important de travailler des coupes adaptées à leurs mouvements. Pour cela, on va s’efforcer de créer des produits confortables et plein d’élasticité.

Prendre en compte la sécurité
Pour les kids, la sécurité avant tout ! Créer des produits enfant, c’est prendre en compte les normes de sécurité en vigueur.
Même si les fabricants spécialisés sont formés sur ces problématiques, en tant que styliste, je dessine le produit et je dois donc faire attention à proposer des vêtements sécurisés pour mes clients créateurs de marque. Et oui, dès la phase de création de la collection, on peut anticiper ces détails concrets pour éviter de perdre du temps lors de la production !
L’avantage de collaborer avec une modéliste enfant dès la conception des produits, c’est qu’elle va pouvoir confirmer que tout est possible et sécurisé sur le projet. Les normes existantes sont consultables auprès de l’AFNOR (payant) et peuvent concerner par exemple les boutons à bien fixer ou l’utilisation des cordons (risque d’étranglement).
Il va de soi que l’emploi de matières non toxiques est d’autant plus indispensable pour les enfants.

Anticiper les besoins des parents et des enfants
En tant que parent, on n’a pas envie de passer des heures à habiller nos marmots avant l’école le matin. Il est donc important de s’adapter à leurs besoins pratiques et de créer des produits fonctionnels et ergonomiques.
Cela se traduit par exemple par des vêtements simples à enfiler pour les plus jeunes. La styliste et la modéliste enfant vont donc réfléchir à des systèmes de passage de tête et de hanches faciles grâce à l’élasticité des produits ou des fermetures prêtes à l’emploi.
On sait aussi que les vêtements sont mis à rude épreuve par les kids, on peut donc prévoir la robustesse de ces produits pour des lavages fréquents. Pour cela, il faut penser à des matières bien résistantes et à des coutures renforcées.
Pour les vêtements enfants, l’acheteur et le consommateur sont 2 personnes bien distinctes : le parent achète et l’enfant porte le vêtement. Il faut donc concilier les attentes esthétiques des parents et les envies des enfants. Même si l’enfant a son mot à dire lors de l’achat du vêtement, le parent prendra rarement un produit qu’il n’aime pas, ou qu’il juge trop provocant, trop voyant, trop kitsch pour son enfant. Il est donc essentiel de connaître votre client cible sur le bout des doigts pour savoir quel style de produits lui proposer.
Comment la styliste et la modéliste collaborent pour créer une collection enfant
Le rôle de la styliste dans la vision créative
Dans un premier temps, la styliste de Mode crée une collection à partir du cahier des charges de la marque. Pour commencer, elle utilise plusieurs outils d’inspiration : le mood board et le plan de collection.
Le mood board, c’est une planche d’inspiration qui rassemble des visuels pour créer une histoire de base pour la collection. Par exemple, dans le secteur enfant, on peut facilement s’amuser à partir d’un thème très imagé : voyage dans le Nevada, chasse aux papillons…

Le motif étant très présent dans le secteur enfant, je fais attention de l’inclure rapidement dans les inspirations si la collection le permet. C’est souvent ce qui permet aux créateurs de se démarquer et de vendre le produit (il faut que ce soit bien visuel, « coup de cœur » comme on dit dans le métier).
Le plan de collection
Le plan de collection, c’est un tableau de visualisation des futurs produits de la collection. Il contient une colonne par produit avec des croquis ou photos approchantes, les types de matières à utiliser ou encore les couleurs des produits. Pour l’enfant comme dans toute collection, la styliste veille à optimiser la future production en utilisant plusieurs fois la même matière, la même couleur, le même motif.

Ensuite, on passe aux croquis ! À partir de ces bases, la styliste dessine les produits enfants. Elle choisit les couleurs en accord avec l’ADN de la marque, mais aussi les inspirations de la collection. En enfant, on utilise souvent des couleurs vives et tendances mélangées avec des couleurs plus neutres. Pour le choix des matières, elles dépendent vraiment du type de produit dessiné :
- Côte 1 x 1 pour les bodys et maillots de corps
- Jersey pour les t-shirts
- Molleton pour les sweats
- Denim et sergé pour les pantalons
- Double gaze pour les tops et robes fille

Les matières privilégiées dans le vêtement enfant
Dans tous les cas, on privilégie les matières naturelles (coton, bambou, lin), avec parfois un besoin de renfort en polyester pour gagner en prix ou d’élasthanne pour rajouter de l’élasticité. La plupart des matières sont en maille (armure tricotée) pour les produits confortables. Ce type de matière a des propriété souples et élastique de par l’essence même de sa structure. Mais on utilise aussi le chaîne et trame (armure tissée) pour des pièces plus droite et élégantes.

Dans le dessin des modèles, la différence avec l’adulte, ce sont les proportions. En fonction des tailles souhaitées par la marque, je vais dessiner les produits sur des bases 1 an, 3 ans, 6 ans ou 10 ans grâce à mon logiciel de dessin (Adobe Illustrator).
Une fois les croquis validés, la styliste passe à la création du dossier technique. Il s’agit du fichier final à envoyer à l’atelier de confection pour produire les vêtements. Il doit contenir les croquis dos et devant, un fléchage avec des zooms et des détails, les références couleurs et matières et tout autre détail important pour le développement du produit.
Le rôle créatif de la styliste est donc indispensable pour créer une collection de vêtements cohérente et créative.
Le rôle de la modéliste enfant dans la faisabilité technique
La modéliste enfant travaille sur les tableaux de mesure. À partir d’un fléchage des croquis de la styliste, elle réalise un tableau de mesures qui évoluent de tailles en tailles.
Ensuite, elle transforme les croquis en patron : c’est le passage de la 2D en 3D. Le patron, c’est un peu le puzzle de votre pièce. Travaillé sur papier ou sur logiciel de dessin, il est ensuite imprimé puis placé sur le tissu et découpé. Lorsqu’on assemble les différentes pièces du patron ensemble, on obtient le vêtement. Pour créer le patron, la modéliste enfant peut s’aider d’un logiciel 3D et ainsi proposer une visualisation des modèles. Cela plaît beaucoup aux créateurs de marque, et cela permet d’avoir une vision encore plus réaliste du produit.
En général, la modéliste travaille sur une seule taille de patron, la taille de base étant de 6 ans pour l’enfant et 1 an pour le bébé. Cela permet à l’usine de développer une taille de référence pour le prototype, puis de la modifier à souhait sans devoir toucher à toutes les autres tailles.
Lorsque cette partie est terminée, la modéliste enfant envoie ses patrons et tableaux de mesure à l’atelier de confection. Une fois le dernier prototype validé, elle peut reprendre la main pour effectuer la mise à jour du tableau de mesures et la gradation du patron. À partir de la taille de base, on modifie les mesures de façon proportionnelle sur le patron, de sorte à obtenir les différentes tailles.
Le regard de la modéliste sur le travail de la styliste va permettre une seconde optimisation du modèles, notamment dans les finitions et l’assemblage. Tout cela peut vous faire économiser de précieux deniers sur la production.

Les échanges entre styliste et modéliste enfant
La modéliste enfant traduit les idées créatives de la styliste en vêtements concrets
Pendant la phase de création de la collection, l’idéal est de pouvoir collaborer dès le début du travail avec la modéliste. C’est là que notre collaboration prend tout son sens.
Ensemble, on va pouvoir se poser les bonnes questions et faire les meilleurs choix sur les matières et la technicité des produits. Cette phase de brainstorming permet de faire face à toutes les éventualités et d’éviter les mauvaises surprises pour la suite. Aussi, se mettre d’accord sur la technicité permet d’éviter des allers-retours comme la modification multipliée des dossiers techniques.
La modéliste enfant peut également avoir besoin d’être briefé par la styliste sur ses dossiers techniques. En échangeant directement ensemble, il y a moins de perte d’informations. On peut discuter des modèles et répondre à nos questions mutuelles. Parfois, les détails du produit peuvent ainsi évoluer.

Les commentaires pour les prototypes
Lorsque le vêtement part en prototypage auprès de l’atelier de confection, la modéliste et la styliste peuvent à nouveau intervenir ensemble. Elles vous aident en commentant les prototypes lors des essayages pour leur apporter des améliorations.
Mes clients me demandent souvent de commenter leurs prototypes, mais je trouve que je suis beaucoup plus efficace en travaillant avec une modéliste sur ce point. Car si je vais voir les défauts esthétiques, la modéliste va pouvoir donner la solution technique concrète pour améliorer le produit.
Par exemple : si je dis « ça fait un pli là, c’est pas joli » la modéliste dira « il faut faire une pince à cet endroit » !
La phase de développement des prototypes peut être frustrante pour le créateur de marque, car c’est parfois long et on peut être déçu du premier résultat. Mais c’est une étape essentielle, surtout pour des produits enfant. De ce fait, n’hésitez pas à procéder à des essayages avec des modèles vivants et à récolter leurs avis : se sentent-ils bien dans le vêtement ?
Les opportunités de la collaboration styliste et modéliste sur le secteur enfant
Finalement, je vois une grande opportunité dans la collaboration modéliste-styliste sur le secteur enfant. Par exemple, on voit de plus en plus apparaître le besoin de vêtements durables qui se passent de génération en génération, et que l’enfant peut porter sur plusieurs âges. C’est pourquoi le vêtement évolutif a fait son apparition. En collaborant avec la modéliste et la styliste, on peut imaginer des systèmes évolutifs innovants. Je pense également à des produits plus faciles à fermer et à ouvrir. On peut réfléchir à des systèmes de fermetures peu utilisés pour faciliter la vie des parents et l’autonomie des enfants (aimants, scratchs…).
De plus en plus de parents sont frustrés de ne pas trouver la taille de leurs enfants dans les enseignes classiques. En effet, la grande distribution propose des tailles standards sans prendre en compte les petites différences de chacun. C’est pourquoi il serait intéressant de voir des marques apparaître pour des besoins spécifiques : petites filles plus grandes que la moyenne, bébés plus potelés…
Études de cas : exemples concrets de projets collaboratifs
Création d’un pantalon ergonomique pour enfants
Pour la création de la collection de mes clients, la marque Bobo Bassari, nous avons imaginé un pantalon bébé en molleton, une matière épaisse en maille élastiquée. Le Challenge : le produit devait être confortable et élégant, respectant l’ADN de la marque. À la base, j’avais proposé un faux pantalon à pont (des boutons sur le devant du produit) mais avec élastique pour éviter toute fermeture compliquée pour les parents. Le problème : je n’étais pas certaine que ce soit joli et que l’élastique suffise au passage de la taille.
Grâce à l’avis de la modéliste sur ce projet et à nos échanges, nous avons trouvé une solution pour garder le charme de ce produit et sa praticité. La modéliste a proposé d’intégrer un élastique au dos du modèle. Ainsi, nous avons trouvé un compromis entre le beau et le confortable.
Une robe festive pour une cérémonie
Au printemps, il est d’usage de proposer des robes de cérémonie pour les petites filles pour Pâques ou les mariages. Le besoin de base est donc esthétique : il faut séduire à la fois parents et enfants.
Lorsque je travaillais pour la marque Gémo, j’ai proposé une robe cintrée avec du volume sur la base de la robe et une frise avec un motif papillon qui faisait tout le tour. Pour qu’elle soit visible et mise en valeur, il fallait donc que le volume du produit ne la cache pas.
La modéliste a pris en compte le rendu du croquis pour intégrer les détails du volume (volants, doublures) tout en mettant en valeur mon motif.


L’importance d’un duo solide pour une marque pérenne
La styliste et la modéliste forment un duo complémentaire : l’alliance de la créativité et de la faisabilité. L’impact est direct sur la qualité des produits, l’objectif étant de proposer des vêtements qui plaisent et qui durent pour les enfants.
Les produits peuvent être d’autant plus optimisés grâce à l’utilisation du modélisme 3D et à la visualisation plus rapide des volumes sur ordinateur. En bref, s’entourer de ces deux professionnels est la clé d’une collection réussie !
Merci à Wendy de m’avoir ouvert son blog ! Si vous cherchez une styliste pour créer votre collection enfant, vous pouvez me contacter via ce lien.

2 réponses
Bonjour,
Je souhaiterais savoir si vous réalisez le patronage de bodies bébé de zéro à 24 mois en manches longues et court.
Merci à vous,
Cordialement,
Bonjour,
Merci pour votre commentaire 🙂
Je ne réalise plus de prestations de patronage.
Bien à vous,
Wendy